Dakar, le — La tension monte autour des relations entre le Sénégal, le Fonds Monétaire International (FMI) et les anciens dirigeants du pays, à la suite des révélations sur l’existence d’une dette cachée évaluée à plusieurs milliards de dollars. Alioune Tine, juriste, militant des droits humains et fondateur du think tank Afrikajom Center, a lancé une critique vigoureuse contre ce qu’il appelle des « manœuvres » retardant l’action, exigeant de la clarté et de la responsabilité.
Le contexte : dette non déclarée, attentes fortes
D’après plusieurs audits — notamment ceux de la Cour des Comptes — et à la suite d’une mission du FMI — le gouvernement de Macky Sall aurait dissimulé des montants considérables d’endettement entre 2019 et 2024. Ces dettes non déclarées auraient servi à emprunter davantage sur les marchés, tout en minimisant artificiellement l’endettement réel du pays. Le Monde.fr+2Le Dakarois+2
Le FMI, par sa mission dirigée par Edward Gemayel, a confirmé l’existence de ces écarts substantiels entre les chiffres officiels transmis et l’endettement vérifié par les auditeurs. Le Monde.fr
Les accusations d’Alioune Tine : manœuvres, silence et responsabilité
Alioune Tine ne mâche pas ses mots. Selon lui :
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Il y a des manœuvres institutionnelles, et parfois internationales, qui retardent l’accès du Sénégal aux financements qu’il juge nécessaires au développement. Il dénonce notamment des lenteurs dans le traitement des dossiers de dérogation du FMI. IGFM
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Il interroge les anciens responsables du régime précédent : « Où sont passés les 4000 milliards de francs CFA de dette cachée ? », s’interroge-t-il. Cette somme représenterait la partie non dévoilée de l’endettement, dont l’existence a été confirmée par les audits et le FMI. Le Dakarois+1
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Il exige que les ministres, anciens et actuels, donnent des explications claires sur l’usage de ces fonds, afin que la population puisse comprendre l’ampleur des abus ou des négligences. Le Dakarois+1
Les enjeux : au-delà de la dette, la confiance
Pour Alioune Tine, ce qui est en jeu ne se limite pas au montant de la dette :
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La confiance publique : La population attend la transparence de ses dirigeants. Toute dissimulation — ou même tout doute — mine la légitimité du pouvoir et suscite colère et méfiance.
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La crédibilité internationale : Le Sénégal, pour ses accords et prêts futurs, doit montrer qu’il maîtrise ses finances publiques. Les partenaires comme le FMI ou les bailleurs externes surveillent de près la gouvernance, la rigueur et la redevabilité.
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L’urgence sociale : Les effets de ces dettes non déclarées pèsent sur la capacité de l’État à financer les dépenses essentielles — santé, éducation, infrastructures — et sur les conditions de vie des Sénégalais. Le temps joue contre les autorités si des mesures correctrices ne sont pas prises rapidement.
Les réactions et les perspectives
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Le FMI, tout en confirmant la dette cachée, a indiqué qu’il y avait des lacunes graves dans le contrôle budgétaire et que certaines conditions pour avancer dans les financements n’étaient pas encore remplies. Le Monde.fr
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Le vote de la dérogation attendue au Conseil d’administration du FMI, qui devait permettre l’accès à de nouveaux financements, a été retardé, officialisant pour beaucoup la perception qu’il existe des blocages administratifs ou politiques. IGFM
Conclusion
Le coup de gueule d’Alioune Tine met en lumière un dilemme fondamental pour le Sénégal : comment concilier la nécessité de transparence, de responsabilité, et le besoin pressant de financements pour maintenir le développement et les services publics ?
Tine appelle non seulement à des explications sur les faits passés, mais aussi à des engagements fermes pour que le pays ne soit plus à la merci des « manœuvres » — internes ou externes — qui retardent sa marche vers une croissance durable et juste.